
La grande traversée
Oui, les scientifiques sont de grands explorateurs. Sur Terre, dans le cosmos ou même dans le cerveau, ils ne cessent de découvrir, de construire ou d’imaginer de nouveaux types d’espaces. On part avec eux…
Des paysages de lichens, de mousses, d’herbes basses parsemés de trous d’eau, de mares, de tourbières : c’est ce qu’observent écologues et géologues en Sibérie, en Alaska, au Canada. Le sol arctique est particulièrement touché par le réchauffement climatique, et ce n’est plus seulement sa couche superficielle qui dégèle, mais le permafrost lui-même. Sur quelques centimètres, parfois quelques mètres de profondeur, ce mélange de roche et de glace vieux de plusieurs milliers voire millions d’années, qui s’étend sur plus de 20 millions de km2, est en train de dégeler. Un phénomène totalement nouveau à l’échelle géologique, tant par son ampleur que par sa rapidité : “En moins d’un siècle ! Alors que le dégel du permafrost se fait normalement à l’échelle d’une période interglaciaire, sur plusieurs milliers d’années”, constate Antoine Séjourné, géologue à l’université Paris-Saclay. D’après les dernières prévisions, son dégel saisonnier augmentera de 65 % en Sibérie d’ici à 2100. Et déjà les espaces se remodèlent. Sur les côtes arctiques, des terrains disparaissent, emportés par l’accélération de l’érosion. Dans les terres, c’est le sol qui s’affaisse. Car cette eau est parfois drainée dans des conduits souterrains du permafrost dégelé ouvrant dans le sol des trous de plusieurs mètres de profondeur. Ce qui affecte l’usage des terres et la stabilité des infrastructures humaines. Et partout des mares, des étangs, et même des lacs se forment…