cellule de levure extraite de l'article nous vivons dans un monde en sommeil du hors-série 16 d'epsiloon

Nous vivons dans un monde en sommeil

Changement de paradigme : les biochimistes découvrent que loin de proliférer frénétiquement, les bactéries, les cellules, végétales et animales, passent la majorité de leur temps en pause, au ralenti. Et si vivre, c’était d’abord suspendre le temps ?

par Alexane Roupioz,

“C’est comme si nous avancions dans un multivers où la perception du temps est multiple, s’émerveille la biologiste Isabelle Sagot, à l’Institut de biochimie et génétique cellulaires du CNRS, à Bordeaux. Chaque fois que nous observons quelque chose, c’est différent de tout ce que nous connaissions jusque-là.” Cet univers, c’est celui du temps suspendu. Un monde où les cellules du vivant mettent curieusement en pause leur programme de prolifération, stoppant temporairement leur mécanisme de division. Un processus pourtant essentiel à la vie dont il scande le déroulé, génération après génération… Un univers peuplé de cellules plongées dans un état de quiescence, pour utiliser le mot des biologistes, comme à l’arrêt. 

Pourtant il y a peu, c’est à peine si le sujet éveillait l’attention des scientifiques. “Quand j’ai commencé à étudier la quiescence, peu de personnes trouvaient cela pertinent”, se souvient Isabelle Sagot, qui s’intéresse à cet état cellulaire chez la levure depuis le début des années 2000. Biologistes et généticiens n’avaient d’yeux que pour les cellules qui se divisent. Après tout, ce sont elles la clé pour comprendre la vie et percer le secret de l’évolution des espèces.

Happés par ces questionnements existentiels, ils en ont oublié de regarder ce qui se passe dans la nature. “La plupart des études en laboratoire utilisent un milieu chaud et riche en nutriments pour accélérer la division cellulaire, mais cela n’est pas représentatif du monde naturel”, relève Hyun Youk, professeur de biologie des systèmes à l’école de médecine UMass Chan, aux États-Unis. 

Abonnez-vous et ne manquez aucun numéro
Chaque mois,dans votre boîte aux lettres
Toutes les archives,accessibles en ligne
La version numérique,avec l'appli Epsiloon
Un espace abonné,pour gérer mon compte