puce électronique pour illustrer la lumière stratégique, un article du magazine scientifique d'actualité epsiloon@Clouds Hill Imaging/SPL

Lumière stratégique : tout tient en 13,5 nanomètres

Oui, c’est tout petit. Mais c’est cette lumière ultra-fine, quasi inaccessible, qui a permis de démultiplier la puissance des dernières générations de puces. Sans elle pas de smartphone, pas de supercalculateur. Un atout stratégique, dont une seule entreprise a le monopole.

par Xavier Boivinet,

Sans elle, le dernier iPhone n’existerait pas ; pas plus que le précédent ; ni les derniers ordinateurs d’IBM ; ni les supercalculateurs qui poussent partout dans le monde pour faire tourner les intelligences artificielles. Elle, c’est une lumière. Mais pas n’importe laquelle : une lumière invisible à l’œil nu, à la limite des rayons X, qui rayonne dans l’ultraviolet extrême, à une longueur d’onde de 13,5 nanomètres précisément.

Baptisée EUV, pour extreme ultraviolet, elle mène le monde technologique par le bout du nez. “La lithographie ultraviolette extrême est indispensable pour graver les puces les plus avancées”, pose Paolo Gargini, directeur de l’IRDS, l’International Roadmap for Devices and Systems, l’organisation qui regroupe les experts des semi-conducteurs et établit une feuille de route pour prédire les évolutions futures. “C’est une technologie clé de la dernière décennie d’innovations”, abonde Mukesh Khare, directeur général de la division semi-conducteurs chez IBM Research. Elle occupe une place tout à fait singulière dans l’économie industrielle mondiale, car en dépit de son importance primordiale une seule société dans le monde détient le monopole de cette technologie : la société ASML, pour Advanced Semiconductor Materials Lithography, basée aux Pays-Bas, est la seule capable de fabriquer les machines de lithographie dans l’ultraviolet extrême.

Les dirigeants n’ont pas souhaité répondre à nos questions, mais si l’on en croit les rapports annuels, ASML ne distribue pas moins de quarante machines de lithographie EUV par an depuis 2021, chacune valant autour de 200 millions d’euros, voire près de 300 millions pour la dernière version –  es ventes représentant 40 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. C’est simple, tous les grands noms des semi-conducteurs en sont dépendants. Intel, Samsung, Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), SK Hynix, Micron… “Les industriels n’ont d’autre choix que de s’y mettre s’ils veulent rester dans la course, souligne Patrick Naulleau, directeur du Centre pour l’optique des rayons X au laboratoire national Lawrence Berkeley, aux États-Unis, également directeur général d’EUV Tech, une entreprise qui fournit à ces grands groupes des équipements de métrologie dédiés à la lithographie EUV. Samsung a été le premier à faire usage de la lithographie EUV pour des produits commerciaux, en 2019. TSMC l’a emmenée vers des gros volumes de production.”

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