Dans le piège des écrans
C’est un petit geste qui nous permet de faire glisser sans fin, d’un simple coup de pouce, images et informations sur nos écrans : le “scrolling”. Un piège auquel notre cerveau est incapable de résister.
Nous sommes en avril 2020, et Karen K. Ho dort mal. En pleine pandémie, cette journaliste canadienne ne lâche plus Twitter, happée par le flot incessant de mauvaises nouvelles qui défilent. Autour d’elle, nombreux sont ceux en proie aux mêmes affres. Karen K. Ho décide d’agir : elle publie tous les soirs sur Twitter des messages d’encouragement. “Et si tu allais te coucher ?” “Peut-être qu’un verre d’eau te ferait du bien.” “Es-tu sorti aujourd’hui ?” Le but : inciter les internautes qui la suivent à arrêter de doomscroller à l’infini. Issu de la contraction de doom (le désastre, l’apocalypse) et scroll (faire défiler, parcourir), le doomscrolling désigne l’action de consulter de façon compulsive des contenus multimédias négatifs ou anxiogènes.
Le geste n’est certes pas nouveau, mais “beaucoup de personnes ont été choquées, peut-être même traumatisées par la crise sanitaire et le discours très anxiogène qui l’a entourée. Et pour beaucoup, cela signifiait prendre son smartphone et consulter les actualités”, constate Édith Galy, chercheuse en ergonomie spécialisée dans le technostress et la charge mentale à l’université Côte d’Azur, à Nice. Au point, pour certains, comme Karen K. Ho, d’être happés par le puits d’informations sans fond de leur écran, hypnotisés par l’infini…