Homo fictionus : l’espèce qui se raconte des histoires
Depuis les cavernes et les premiers feux, Sapiens se raconte des histoires. Les anthropologues retracent l’histoire de ces histoires, les neurosciences découvrent leur profondeur : elles modèlent nos cerveaux et assurent la cohésion du groupe humain. Rien que ça.
D’où vient notre amour insatiable pour les histoires ? Quel est le pouvoir de ces récits que l’on partage ? Anthropologie, sciences cognitives et neurosciences commencent à comprendre. Et à expliquer pourquoi, comme l’écrit joliment l’écrivaine Nancy Huston dans L’Espèce fabulatrice, “aucun groupement humain n’a jamais été découvert circulant tranquillement dans le réel à la manière des autres animaux : sans religion, sans tabou, sans rituel, sans généalogie, sans contes, sans magie, sans histoires, sans recours à l’imaginaire, c’est-à-dire sans fictions”.
Homo fictionus… L’histoire des histoires remonte à la nuit des temps. “Tous les groupes humains ont un récit qui raconte leur propre origine. Et on peut affirmer à 90 % que plusieurs mythes étaient présents au paléolithique”, avance Jean-Loïc Le Quellec, anthropologue et préhistorien des mythes, dont les derniers travaux remontent même à ce qui est probablement le premier de tous les récits : le mythe de l’émergence primordiale, qui décrit comment les animaux et les humains sont un jour sortis de terre pour peupler le monde. “Au moment où les peintres, hommes ou femmes, ont orné les cavernes, ils avaient ce mythe en tête.”