Métaux étranges : la piste du trou noir !
Et si la plus ambitieuse des théories physiques était en train de se matérialiser sous nos yeux ? C’est la découverte de physiciens qui étudient une classe particulière d’alliages métalliques : leur comportement est semblable à celui des trous noirs.
“Cette découverte, c’est l’une des plus belles surprises de ma carrière !”, rayonne Subir Sachdev. Tout a commencé il y a 20 ans, dans les années 1990, alors que ce spécialiste de la matière quantique, à Harvard, travaillait à une théorie permettant d’expliquer le comportement très étrange de certains matériaux. “Étrange”, c’est l’expression aujourd’hui consacrée dans le milieu de la physique de la matière quantique pour parler de cette bizarrerie qui s’exprime dans les cuprates, des alliages métalliques truffés d’oxydes de cuivre découverts en 1986 et étudiés depuis avec une grande attention pour leurs propriétés de supraconducteurs à haute température.
Cette étrangeté est électrique. Elle prend à revers une loi prédite par la théorie des liquides de Fermi, le vénérable corpus qui décrit les métaux, elle-même tirée de la sacro-sainte théorie quantique, sur laquelle se fonde toute la physique de la matière : normalement, à basse température, les métaux voient leur résistance électrique diminuer comme le carré de la température. Sauf qu’ici, à l’intérieur des cuprates, les physiciens ont eu beau mesurer et re-mesurer, la résistivité à basse température s’affiche sur leurs écrans comme une belle droite, bien lisse. Elle est proportionnelle à la température, et non à son carré…