Espace : la ruée vers l’orbite basse
Une nouvelle ère de la conquête spatiale est ouverte : celle des mégaconstellations de satellites qui, SpaceX d’Elon Musk en tête, colonisent, ni vu ni connu, l’orbite basse. L’enjeu : maîtriser les futures autoroutes de l’information. Premier arrivé, premier servi.
Ces derniers mois, l’espace a attiré tous les regards. Nous avons d’abord assisté à un duel entre milliardaires, chacun revendiquant le lancement de la nouvelle ère du tourisme spatial. Nous avons suivi la chronique en apesanteur d’un Thomas Pesquet en orbite. Observé le déploiement de la station spatiale chinoise. Rêvé du retour de l’humain sur la Lune, de l’exploration de Mars… Un bouillonnement médiatique qui, pourtant, ne dit rien de la vraie révolution spatiale. Une conquête silencieuse, opaque, passée sous les radars, mais autrement plus féroce, se déroule en ce moment même, juste là, au-dessus de nos têtes.
À la manœuvre, les golden-boys de l’espace, Elon Musk et Jeff Bezos, mais également une myriade d’entreprises moins célèbres. Leurs armées : des “mégaconstellations”, cohortes innombrables de satellites lâchés autour de la Terre, en train d’annexer, ni vu ni connu, des orbites entières.
Une frénésie, une déferlante…
Le premier assaut date de moins de trois ans. En février 2019, l’entreprise OneWeb, contrôlée par le gouvernement britannique et un industriel indien, a lancé ses premiers satellites. Rejoints dès le mois de mai 2019 par ceux de Starlink, une filiale de SpaceX créée par Elon Musk. Depuis, des bataillons d’engins s’envolent à un rythme effréné : plus de 30 par mois pour OneWeb ; près de 120 pour Starlink. Une déferlante qui a fait de 2020 une année record par le nombre de lancements dans toute l’histoire spatiale : 114 au total. Dont les deux tiers pour le seul Starlink, qui devient au passage le plus gros opérateur d’objets spatiaux.
Qu’on se rende compte : ces déploiements ont doublé le nombre total de satellites actifs en orbite. Ils étaient 4 084 à la fin du mois de juillet. Mais leur nombre aura encore grossi quand vous lirez ces lignes.
Dire que l’on veut connecter le monde, réduire la fracture numérique, tout ça, c’est du flan
Un cadre anonyme travaillant chez l’un de ces opérateurs
Et tout cela n’est qu’un début. Car les objectifs affichés sont impressionnants. OneWeb compte propulser 648 satellites et Starlink… 41 493 ! Et ils ne sont pas les seuls. Il faudra aussi compter avec le projet Kuiper de Jeff Bezos, Guo Wang du gouvernement chinois, Lightspeed du canadien Télésat… De quoi donner le tournis : car on parle ici de presque 60 000 satellites en tout. Et même 75 000, si d’autres projets moins avancés voient également le jour. En d’autres termes : l’humanité s’apprête à lancer dans les dix prochaines années près de dix fois plus d’objets en orbite qu’en soixante-quatre ans de conquête spatiale depuis Spoutnik 1. à cet horizon, il y aura au bas mot 15 fois plus de satellites qu’aujourd’hui.
Du big business
L’enjeu de cette frénésie ? Fournir l’accès Internet à haut débit partout dans le monde. En particulier aux 49 % de la population mondiale qui en sont totalement dépourvus. “Certains pays isolés, notamment en Afrique, vont enfin pouvoir développer leur économie, s’enthousiasme Walter Peeters, ex-président de l’International Space University. Ça va vraiment changer le monde.” Un argument philanthropique qui cache en fait une affaire de gros sous.
Le calcul est le suivant : certes, ces mégaconstellations représentent un énorme investissement – près de 30 milliards d’euros pour Starlink, selon Elon Musk. Mais en facturant 99 € par mois l’abonnement comme il le prévoit, il suffit d’un million d’utilisateurs, soit une infime partie du marché potentiel, pour décrocher une rente de 1,2 milliard par an.
“Dire que l’on veut connecter le monde, réduire la fracture numérique, tout ça, c’est du flan, admet sous couvert d’anonymat un cadre travaillant chez l’un de ces futurs opérateurs. La vérité, c’est le big business : fournir l’Internet à ceux qui peuvent se le payer.” Maxime Puteaux, spécialiste de l’économie de l’espace chez Euroconsult abonde : “à ce prix-là, le principal marché, ce n’est pas l’Afrique, mais les zones blanches des pays industrialisés.” Starlink vient d’ailleurs de décrocher un contrat public de 800 millions de dollars pour connecter les territoires américains non fibrés.
Il n’y avait que dans James Bond que des milliardaires construisaient leurs propres constellations. Aujourd’hui, on y est, et notre arsenal juridique n’est plus adapté
Jean-Jacques Tortora, directeur de l’European Space Policy Institute
Sans compter les perspectives alléchantes de la révolution numérique. “Internet des objets, smart cities, guidage des voitures autonomes, cloud… Les mégaconstellations auront un rôle central dans cette révolution”, analyse Éric-André Martin, spécialiste des politiques spatiales à l’Institut français des relations internationales. Un futur qui se conjugue déjà au présent : le constructeur chinois Geely s’apprête à développer sa propre armada afin de connecter ses voitures autonomes. Et ce n’est pas un hasard si Starlink a signé il y a quelques mois des partenariats avec les activités cloud de Google et Microsoft. Ni si Jeff Bezos veut développer sa propre constellation au service de sa filiale Amazon Web Services, le leader mondial du cloud. “Musk et Bezos viennent du numérique : PayPal et Amazon, rappelle Éric-André Martin. Ce ne sont pas des illuminés : ils ont une vision très claire et affûtée de ce business.”
Un nouveau far west !
Avec SpaceX, Elon Musk est d’ailleurs l’un des principaux artisans de la révolution dite du “New Space”, bouleversement technologique et industriel, qui a démocratisé l’accès à l’espace et réduit le coût des satellites et de leur lancement. Sans cette baisse radicale du ticket d’entrée, l’Internet à haut débit par satellite serait resté un fantasme.
“Ce qui était infaisable techniquement et économiquement devient possible”, résume Maxime Puteaux. Car pour une bonne connexion, il faut limiter le temps de trajet du signal, et donc se placer le plus près possible de la Terre, en orbite basse, tout en multipliant les satellites – plus un satellite est bas, moins il couvre de surface. C’est pour cela que Starlink, avec une orbite à 550 km et un temps de connexion inférieur à 40 millisecondes, doit en déployer des milliers.
La ruée sur l’orbite basse est donc lancée. “Dans l’espace, il y a des endroits populaires. Ça a longtemps été l’orbite géostationnaire. Maintenant, c’est l’orbite basse, observe Maxime Puteaux. Et cela pose forcément des questions d’appropriation par les mégaconstellations, qui remettent en cause la façon dont on lance, dont on opère et dont on désorbite.” “On est dans un développement pas très contrôlé, avec différents risques. Il faut y être attentif”, ajoute Philippe Baptiste, le président du Centre national d’études spatiales. Stéphane Israël, le patron d’Arianespace, lui, ne mâche pas ses mots dans les médias : “monopolisation” ; “colonisation” ; “far west”…
Premier arrivé, premier servi
“C’est un marché à plusieurs milliards. Tous les moyens sont bons. À vrai dire, ce n’est pas le far west... C’est le wild west !”, résume notre interlocuteur anonyme. Car l’espace n’était pas prêt à ça. Aucune loi, aucune règle commune n’a été prévue pour réguler un tel assaut. “Le cadre actuel date des années 1960, quand l’espace n’était accessible qu’à quelques grandes puissances, observe Jean-Jacques Tortora, directeur de l’European Space Policy Institute, un think tank sur la gouvernance spatiale créé par l’Agence spatiale européenne. Il n’y avait que dans James Bond que des milliardaires voulaient construire leurs propres constellations. Aujourd’hui, on y est, et notre arsenal juridique n’est plus adapté.”
La règle c’est que vous lancez ce que vous voulez, comme vous voulez, quand vous voulez
Christophe Bonnal, ingénieur spatial au Cnes
De fait, le droit spatial se résume à une poignée de traités et conventions qui définissent quelques grands principes : la non-appropriation de l’espace, l’interdiction d’y utiliser des armes, la responsabilité de chaque état face aux dégâts causés par les lancements qu’il autorise, et une liste de bonnes pratiques destinées à limiter la création de débris en orbite. Une sorte de gentlemen’s agreement qui ne prévoit aucune régulation des activités privées… ni aucune sanction. “Résultat : il n’y a aucun garde-fou, aucune concertation”, tranche Alain de Neve, chercheur au Centre belge d’études de sécurité et défense. Aussi surprenant que cela paraisse, rien n’empêche de lancer autant de satellites qu’on veut, où on veut : la ressource spatiale n’est pas gérée.
Bataille au couteau sur les fréquences
De fait, la seule contrainte imposée à qui veut lancer un satellite consiste à se trouver un état lanceur, qui accepte de se porter garant pour lui – en général, le pays qui abrite le siège de l’entreprise ou sa base de lancement. N’importe qui peut ensuite déposer une demande à l’UIT, l’Union internationale des télécommunications, un organisme dépendant des Nations Unies. “Nous vérifions juste le respect de l’utilisation des fréquences et le risque de parasitage avec des services existants”, précise Alexandre Vallet, chef du département des services spatiaux, qui voit depuis quelques années défiler les demandes sur son bureau.
Autrement dit, il n’y a pas de gestion concertée au niveau international. “Je ne donne pas d’autorisation, c’est chaque pays qui le fait”, confirme-t-il. “La règle c’est que vous lancez ce que vous voulez, comme vous voulez, quand vous voulez, résume Christophe Bonnal du Cnes, sauf dans les rares pays qui ont une réglementation. L’UIT ne juge pas du bien-fondé de la mission, juste du bon respect des fréquences.” Sauf que ces fréquences sont justement en train de devenir une ressource critique. “Leur attribution fait l’objet d’une bataille au couteau”, témoigne Éric-André Martin.
Personne ne peut dire non à Elon Musk. Il n’y a pas de norme, pas de limite. Il le sait et va très vite pour occuper le terrain
Xavier Pasco, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique
Entre télécoms, scientifiques et militaires, les négociations sont tendues. Ici, c’est “premier arrivé, premier servi”. Qu’importe votre activité ou son intérêt pour la collectivité. Une logique qui alimente encore la ruée. Car en prime, l’allocation de fréquence est elle-même conditionnée au respect de certains délais : 10 % de la constellation doit être installée dans les 2 ans, 50 % dans les 5 ans et la totalité au bout de 7 ans.
Se faufiler au milieu d’un ballet infernal
Pour couronner le tout, le droit spatial ne prévoit pas de sanction en cas de non-respect. Et il y en a. “Il peut y avoir des erreurs, des problèmes de tolérance ou des acteurs qui n’utilisent pas les fréquences prévues, et on ne le découvre qu’une fois le satellite lancé”, observe Brian Weeden, de la Secure World Foundation, un organisme qui promeut une utilisation durable et responsable de la ressource spatiale. Des débats sont en cours pour adapter les lois, mais ça prendra du temps.”
En attendant, note Xavier Pasco, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique, “personne ne peut dire non à Elon Musk à partir du moment où un État le soutient. À l’UIT, on ne fait qu’enregistrer. Il n’y a pas de norme, pas de limite. Musk le sait, et il va très vite pour occuper le terrain”. Ce qui pose dans la foulée une myriade de problèmes. D’abord celui de la gestion du trafic en orbite : “On va être confrontés à des situations de crise, avec un encombrement tel que l’accès à l’espace sera difficile”, pose Jean-Jacques Tortora.
Des satellites jetables
Les mégaconstellations risquent en effet de gêner les futurs lanceurs, qui devront se faufiler au milieu de ce ballet infernal. Sachant qu’il n’existe aucune base officielle, complète et fiable des engins en activité. Et donc aucun management global du trafic, comme c’est le cas pour les avions. Tout repose sur des radars, qui scrutent le ciel pour savoir qui fait quoi et où. Avec une piètre précision. “On sait où se situe un satellite à 1 ou 2 km près”, précise émeric Lhomme, à Arianespace.
L’agence russe Roscosmos a ainsi eu la mauvaise surprise, le 1er juillet dernier, de voir un de ses vaisseaux frôlé à 3 min d’intervalle par un satellite Starlink et par un fragment de Falcon 9 (le lanceur de Starlink), passé à seulement 500 m de lui. Une paille à l’échelle spatiale. “C’est la première fois que le problème se pose de façon aussi concrète”, souffle Alexandre Vallet. En septembre 2019, c’était l’Agence européenne qui avait dû dévier un de ses satellites d’observation pour éviter une collision… Une première ! Starlink aurait tout simplement répondu qu’il “n’envisageait pas de déplacer son satellite”.
Une dangereuse explosion du nombre de débris
Un problème de congestion qui pourrait aggraver une autre situation déjà critique : celle des débris. “C’est ça le plus gros problème”, estime Émeric Lhomme. Car en plus des satellites actifs, il faut aussi éviter les déchets spatiaux qui, lancés à pleine vitesse, agissent comme des projectiles, conférant à la moindre particule de 1 mm de rayon l’énergie d’une boule de bowling lancée à 100 km/h. Sachant que 900 000 débris de plus de 1 cm rôdent déjà en orbite, les mégaconstellations font ressurgir le spectre du syndrome de Kessler, popularisé par le film Gravity : une collision produisant des débris, entraînant d’autres collisions et d’autres débris… une spirale infernale et dévastatrice.
Sur l’évitement des collisions, la limitation des débris, la gestion des objets en fin de vie, il y a un corpus de bonnes pratiques… mais très mal suivi!
Christophe Bonnal, ingénieur spatial au Cnes
Une crainte d’ailleurs moins liée aux dimensions de ces mégaconstellations qu’aux méthodes cavalières de leurs opérateurs. “Les satellites de Starlink sont peu fiables… ce sont presque des consommables”, tacle Émeric Lhomme. “Ils n’ont pas tous les standards de qualité habituels”, confirme Christophe Bonnal. Des satellites jetables en quelque sorte. La preuve : selon les données que nous a fournies l’UIT, sur les 1 740 premiers satellites lancés par Starlink, seuls 1 630 seraient actifs. Soit 6 % déjà en panne, transformés en débris après seulement deux ans. “Certains l’étaient même déjà au moment du lancement !, dénonce Jean-Jacques Tortora. Si on extrapole au nombre de satellites prévus, ça promet une quantité non négligeable de débris.”
L’ISS a déjà reçu de nombreux impacts
Un risque d’autant plus sérieux que la constellation de Starlink orbite seulement 150 km au-dessus de l’ISS, la Station spatiale internationale. “Chaque satellite passe deux fois par son orbite : en montant et en redescendant”, note Christophe Bonnal. L’ISS a déjà reçu de nombreux impacts, dont un découvert le 12 mai dernier dans son bras robotisé. Et ce malgré de fréquentes manœuvres d’évitement : trois, rien qu’en 2020. “Les mégaconstellations vont décupler, centupler les risques”, estime Christophe Bonnal.
“On arrive à la limite de ce qu’on peut laisser faire”, juge Jean-Jacques Tortora. Starlink, qui n’a pas répondu à nos multiples sollicitations, se justifie en arguant que ses satellites peuvent facilement être dirigés vers l’atmosphère, où ils se vaporiseront sous l’effet des frottements. “Mais ça, c’est dans l’hypothèse où ils en gardent le contrôle. Et s’ils tombent en panne ?”, interroge Christophe Bonnal. Du côté de OneWeb, on nous assure “avoir mis en place des processus rigoureux pour savoir où se trouvent les satellites, et partager nos données”. Mais l’expert mondial de ces questions fronce encore les sourcils : “Sur l’évitement des collisions, la limitation des débris, la gestion des objets en fin de vie, il y a un corpus de bonnes pratiques très bien établi… mais très mal suivi.”
Les images “brûlées” des grands télescopes
D’ailleurs, le fait de désintégrer les vieux satellites ne résout pas tout. Une étude récente s’inquiète ainsi de la pollution que cela provoquerait. En partant d’une flotte de 12 000 satellites d’une durée de vie moyenne de 5 ans, Aaron Boley, de l’université de la Colombie-Britannique, estime que 2 tonnes de matière par jour retomberaient dans l’atmosphère ! Dont une majorité sous la forme de poussières d’aluminium qui pourraient changer la chimie de la haute atmosphère. Ou, en reflétant le rayonnement solaire, modifier l’albédo de la Terre.
L’espace a toujours été militarisé, mais aujourd’hui, plusieurs États posent les bases de son armement. Une crise liée à la destruction d’un satellite n’est pas à exclure
Alain de Neve, chercheur au Centre belge d’études de sécurité et défense
Et ce n’est pas tout. Les astronomes s’inquiètent de l’impact de ces futures mégaconstellations sur leurs observations. Avec le risque de voir ces hordes laisser de grandes traînées sur leurs images. Un risque qu’une nouvelle étude, qui devrait être publiée d’ici quelques semaines, tente d’évaluer. En se basant sur une cohorte de 65 000 satellites “assez représentative de la situation dans dix ans”, Olivier Hainaut, astronome à l’Observatoire européen austral, estime que “pour les petits télescopes, la gêne ne concernera que 1 % des observations au crépuscule, quand elle est la plus forte”. Mais pour les gros télescopes à grand champ, comme celui de l’observatoire Vera Rubin en construction au Chili, ce sont jusqu’à 30 % des images qui pourraient être “brûlées” au crépuscule.
De nouveaux enjeux de souveraineté
L’arrivée de ces mégaconstellations soulève enfin une autre question, peut-être la plus sensible : celle de notre dépendance à cette future colonne vertébrale de l’économie numérique. Car tout un pan de la société sera sous perfusion spatiale. Au point de transformer ces futures autoroutes orbitales de l’information en enjeu de souveraineté nationale. La Communauté européenne ne s’en cache pas : c’est même la principale raison qui la pousse à vouloir se doter de sa propre mégaconstellation. “C’est une infrastructure qui sera stratégique, et que l’on doit maîtriser sans dépendre des Américains ou des Chinois, comme pour le GPS”, résume Émeric Lhomme, qui fait partie du consortium chargé de réfléchir au projet qui pourrait voir le jour en 2025.
“Le sujet est tellement stratégique que l’on trouve souvent un gouvernement en soutien : les États-Unis pour Starlink, le Canada pour Télésat, le Royaume-Uni pour OneWeb, la Chine pour Guo Wang”, égrène Luigi Scatteia, chez le consultant PwC. D’ici dix ans, les mégaconstellations seront devenues des infrastructures critiques. Au même titre que les centrales nucléaires ou les aéroports. Se pose donc dès aujourd’hui la question de leur protection en cas de conflit.
Les États-Unis se dotent d’une Space Force
“La queue de la comète, c’est le militaire, décrypte Éric-André Martin. La dépendance au spatial crée fatalement une vulnérabilité.” “L’espace a toujours été militarisé, mais aujourd’hui, plusieurs États posent les bases de son arsenalisation, c’est-à-dire de son armement, abonde Alain De Neve. L’hypothèse d’une crise liée à la destruction d’un satellite n’est pas à exclure : on n’a jamais été aussi proche de ce scénario.”
Difficile de ne pas y voir un lien avec la création par les États-Unis d’une Space Force fin 2019. Rapidement suivis par le Royaume-Uni et la France, puis par l’Allemagne en juillet dernier. L’Otan, la Chine, le Japon et la Corée devraient bientôt les imiter.
Tel est le nouveau monde qui se prépare. L’heure de l’exploitation commerciale intensive de l’espace a sonné. “C’est l’heure de vérité”, annonce Alexandre Vallet. Après une phase de tests dans quelques pays, Starlink est sur le point de lancer son service au niveau mondial, et OneWeb prévoit de suivre d’ici à la fin de l’année. “De leur succès dépendra le déploiement de l’ensemble des constellations”, souffle le spécialiste. De fait, il est déjà possible de se s’abonner à Starlink en France. Et dès la page d’accueil, l’opérateur annonce la couleur. Ici la règle est la même qu’en orbite : “premier arrivé, premier servi".