“Non, Facebook ne polarise pas les groupes”
Nejla Asimovic, chercheuse en science politique, est convaincue du potentiel rassembleur des réseaux sociaux.
Epsiloon : Les réseaux sociaux ne sont donc pas toujours générateurs de divisions entre les groupes ?
Nejla Asimovic : Cela nous a surpris. Mais nos résultats vont en effet à l’encontre des affirmations selon lesquelles les réseaux sociaux en ligne représentent une des principales causes de polarisation des groupes et que la solution, dans tous les contextes, consiste à se désengager du monde en ligne. Pour tester cela, nous avons choisi d’étudier les effets de Facebook sur les clivages ethniques en Bosnie-Herzégovine autour de la commémoration du génocide de plus de 8 000 Bosniaques musulmans, à Srebrenica, au mois de juillet 1995. Les discussions liées à cette guerre dévastatrice s’intensifient considérablement pendant cette période, en ligne et hors ligne. Nous avons donc créé deux groupes de Bosniaques, Serbes et Croates : un premier, dont la consigne était de désactiver Facebook pendant sept jours ; et un second, qui conservait l’accès au réseau. Or, contre toute attente, les personnes privées de Facebook ont fait état de niveaux d’animosités plus élevés envers les autres ethnies que celles qui avaient conservé leur accès. La désactivation de Facebook a donc renforcé les divisions entre les trois ethnies…