Île de Pâques : la fin du mythe
C’est l’archétype de l’effondrement : celui d’une société poussée à sa perte par un aveuglement destructeur. Sauf que tout est faux. On découvre aujourd’hui que les Rapanuis furent au contraire un formidable exemple d’adaptation et d’ingéniosité.
Un groupe de Polynésiens débarque, vers le début du XIIIe siècle, sur une petite île couverte de palmiers située au beau milieu du Pacifique. Puis ils abattent tous les arbres, surexploitent les sols, se reproduisent à grande vitesse, forment des clans, mobilisent une grande partie de leurs ressources pour construire et ériger près d’un millier de statues gigantesques… Au bout d’un certain temps, l’inévitable se produit : il devient impossible de nourrir tout le monde, la guerre est déclarée, c’est le chaos, la famine, le cannibalisme, la dépopulation. Bref : la société s’effondre, et l’environnement de la petite île est à jamais dévasté.
Voilà l’histoire de l’île de Pâques, telle qu’elle circule avec insistance depuis plusieurs décennies. Un récit bouleversant et implacable, repris aujourd’hui par nombre d’écologistes et de collapsologues qui y voient un avertissement pour notre civilisation en pleine crise environnementale ; ces fameuses statues de basalte, les moaï, figurent d’ailleurs en couverture du best-seller mondial Effondrement du biogéographe Jared Diamond. Compétition exacerbée, surexploitation, surproduction : le destin des Rapanuis est censé illustrer à merveille notre aveuglement autodestructeur. Sauf que… tout est faux.