Les lois de la forêt
Non, elle n’est pas juste un agrégat d’arbres. Les études génétiques, les observations au lidar dévoilent aujourd’hui le fonctionnement de cette entité singulière qui s’étend sur toute la planète. Un grand tout… un superorganisme.
“Nous vivons un moment passionnant”, s’enthousiasme l’écologue forestier Martin Kopecky, de l’Institut de botanique de l’Académie tchèque des sciences. Sentiment partagé par son collègue Andreas Huth, du Centre Helmholtz pour la recherche environnementale, à Leipzig : “Quand j’ai commencé ma carrière, on disposait uniquement de données de terrain très parcellaires. On arrive à présent à un point où on peut envisager de reproduire par ordinateur l’évolution de la forêt amazonienne et des 200 milliards d’arbres qui la peuplent.”
Ces jumeaux numériques ont beau être imparfaits, ils illustrent bien le changement d’échelle de la science des forêts. “La constitution de réseaux internationaux de chercheurs qui mettent en commun de vastes jeux de données, couvrant des décennies d’observations, a tout changé”, souligne l’écologue Robert Bagchi.
“Les travaux du GIEC et de son équivalent pour la biodiversité, l’IPBES, ont inspiré cette mise en commun”, précise le généticien Antoine Kremer, de l’Inrae. Il pointe aussi l’importance des récents progrès technologiques en biologie : “Le séquençage complet du génome des arbres était encore très difficile à réaliser il y a dix ans.” Sachant que cette lecture simplifiée et moins onéreuse de l’ADN permet aussi d’étudier de concert tous les autres êtres qui peuplent la forêt, animaux, herbes, buissons, champignons…