une éponge@shutterstock

Nous sommes tous des éponges

Les fossiles le prouvent : l’ancêtre de tous les animaux ressemblait à une éponge. De quoi repenser l’essence même de l’animalité.

par Émilie Rauscher,

Quand on parle d’animal préhistorique, on pense souvent dinosaure, parfois mammouth, voire Homo sapiens… rarement éponge, soyons honnêtes. Grave erreur. La créature longtemps prise pour un végétal est en réalité primordiale. Dans tous les sens du terme. 

Qu’est-ce qu’un animal, déjà ? Basiquement, c’est un être multi­cellulaire mobile, qui respire de l’oxygène et se nourrit de matière organique – une plante, elle, photosynthétise. Mais on s’attend plutôt à un individu avec un corps doté d’organes et de tissus musculaires, nerveux… Rien de tels chez une éponge : pas d’organe, pas de muscle, pas de système nerveux, juste des cellules spécialisées filtrant l’eau pour nourrir son corps poreux avec, ­parfois, une couche organisée superficielle. 

Cela suffit à susciter l’admiration de Paco Cárdenas, systématicien au Muséum de l’évolution de l’université d’Uppsala, en Suède, dont l’équipe décrit régulièrement de nouvelles espèces – on en dénombre aujourd’hui près de 10 000 : “Même sans organes, ce groupe est capable de prouesses incroyables ! Une éponge fonctionne comme une sorte de colonie cellulaire : ses cellules peuvent se déplacer dans son corps, ce qui lui donne une grande flexibilité en termes de croissance, de régénération, d’adaptation. Surtout, cette organisation unique pourrait représenter la première étape dans l’acquisition des tissus chez les animaux !”

Une date étourdissante

Car oui, le premier animal était très probablement une éponge – ou plutôt les éponges sont ce qui se rapproche le plus de l’ancêtre de tous les animaux, scolopendres, méduses et araignées inclus. La paléobiologiste Eleonora Rossi, de l’université de Bristol, au Royaume-Uni, qui vient de publier une étude sur leur histoire évolutive, confirme : “Si nos éponges actuelles diffèrent forcément de ces premières entités, on peut affirmer qu’elles partageaient des caractéristiques, des gènes impliqués dans l’adhérence entre cellules, dans la signalisation… C’est-à-dire ce qui permet aux cellules de s’organiser en structures tissulaires, de communiquer.” Le fondement de l’animalité, en somme. Et Paco Cárdenas insiste : “C’est pour cela que leur étude est si importante : elles sont la première étape et nous racontent l’apparition unique de la multicellularité animale.”

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