“Les bénéfices des échecs sont surestimés”
L’idée est bien ancrée dans les esprits : l’échec serait un tremplin vers le succès. Même Michael Jordan le dit. Pourtant, pour la professeure en management Lauren Eskreis-Winkler, il est grand temps de changer de discours.
Epsiloon : Il y a une sorte d’évidence à penser que pour réussir, il faut essayer, et donc parfois échouer…
Lauren Eskreis-Winkler : Oui, mais c’est une vision simpliste et caduque ! Les gens pensent que l’échec est bien meilleur professeur qu’il ne l’est en réalité. Et c’est justement en travaillant sur la réussite que j’ai découvert qu’il peut aussi constituer un obstacle. Non pas en lui-même, mais parce que nous surestimons de façon systématique la probabilité de rebondir après un échec. C’est en tout cas ce que montre notre étude.
E. : Comment avez-vous réussi à le quantifier ?
L.E.-W. : Nous définissons l’échec, au sens large, comme tout événement ne permettant pas d’atteindre un objectif souhaité : un étudiant ou un professionnel qui n’obtient pas la bonne note à un examen ; mais aussi un malade cardiaque qui ne parvient pas à changer ses habitudes alimentaires ; une personne aux prises avec une dépendance qui ne décroche pas ; un ancien détenu qui récidive… Nous avons mené en tout onze études au cours desquelles nous avons demandé à 1 800 personnes lambda, jouant le rôle de prédicteurs, d’estimer des taux de réussite après échec, que nous avons ensuite comparés avec les statistiques nationales. Et nous observons que le succès est très surestimé !